Sophie Taueber Arp - Les langages techniques & plastiques

Les langages plastiques et techniques de Sophie T.A.

Tableau textile

Tapisserie Dada, brodée au point de croix, 1916 (MNAM, Centre Pompidou)


Détail

Tapisserie Dada, brodée au point de croix, 1916 (MNAM, Centre Pompidou) 

Tableau & mouvement


Rythmes libres, dessins à la gouache, 1919.

Tableau & architecture

L’attention portée aux rythmes nourrit une grande partie de sa production picturale, notamment à l’Aubette dont elle assure la décoration intérieure aux côtés de son époux Hans Arp et de l’artiste hollandais Theo van Doesburg.

Bien que difficile, la collaboration entre les trois artistes aboutit à une œuvre majeure, monumentale et « totale ». Sophie Taeuber-Arp s’est plus particulièrement chargée du dallage du Passage extérieur, de la Salle de billard de la peinture et du vitrail de la cage de l’Escalier, du Palier et du Foyer-bar au premier étage.





A la suite de l’Aubette, elle prend en charge la réalisation de sa maison-atelier à Meudon qui lui procure, ainsi qu’à son mari Hans Arp, un cadre de vie et de travail propice à une création foisonnante et au dialogue artistique.
Cette architecture favorise les rencontres artistiques et permet au couple de participer aux activités d’associations d’artistes telles que Cercle et Carré ou Abstraction-Création.


Tableau & relief (le relief coloré)


L’expérience du travail avec l’espace à l’Aubette conduit Sophie Taeuber-Arp à la mise en œuvre de compositions picturales purement géométriques :

  • les « Compositions statiques », 
  • les « Compositions dynamiques »,
  • les « Espaces multiples » 

Exemples d'oeuvres :
Quatre espaces, 1932

Six espaces, 1934


...mais aussi de sculptures en bois tourné et de reliefs. 
Fondés sur la structure de la grille orthogonale découverte dans ses productions textiles, ces reliefs témoignent, selon Wassily Kandinsky, de la maîtrise des proportions et du sens de la composition de l’artiste.
Sophie Taeuber-Arp s’est exprimée par le moyen du « relief coloré », dans les dernières années de sa vie surtout, se servant presque exclusivement des formes les plus simples, des formes géométriques. Les formes, par leur sobriété, leur silence, leur façon de se suffire à elles-mêmes, invitent la main, si elle est adroite, à se servir du langage qui lui est propre et qui n’est souvent qu’un murmure ; mais, souvent aussi, le murmure est plus expressif, plus convaincant, plus persuasif, que la « haute voix » qui se laisse aller ça et là, à des éclats.
Pour posséder la maîtrise des formes « muettes » il faut être doué de sens affiné de la mesure, savoir choisir les formes mêmes, selon le rapport de leurs trois dimensions, selon leurs proportions, leurs hauteurs, leur profondeur, leurs combinaisons, leur manière de concourir à un ensemble, – en un mot il faut avoir le sens de la composition.
Toutes ces exigences compliquent la tâche, même s’il s’agit de plastique monochrome (plastique de la pierre par exemple). À la beauté des volumes s’ajoute dans les « reliefs colorés » de Sophie Taeuber-Arp le mystérieux, l’émouvant pouvoir de la couleur, qui tantôt avive la voix de la forme simple, tantôt en rabat l’accent ; qui accuse la dureté d’une forme tandis qu’elle donne de la douceur à un autre ; souligne cette saillie, atténue indiciblement cette autre. Et ainsi à l’infini. Un retentissement de voix, une fugue.
L’arsenal des moyens d’expression est d’une richesse inépuisable. Les plus grands contrastes sont : « À voix haute », « À voix basse ». Au tonnerre des timbales et des trompettes dans une ouverture de Wagner s’oppose une tranquille, une « monotone » fugue de Bach.
Ici le tonnerre et les éclairs qui déchirent le ciel, ébranlant la terre ; là, un ciel lisse et gris sur toute son étendue, le vent s’est retiré et a gagné de lointains parages, la moindre brindille nue reste immobile, le temps n’est ni chaud ni froid. Langage calme.
Sophie Taeuber-Arp s’est approchée infailliblement « sans peur et sans reproche » de son but.
(Paris, juin 1943)
Wassily Kandinsky, « Les reliefs colorés de Sophie Taeuber-Arp », in Georg Schmidt, Sophie Taeuber-Arp, catalogue de l’œuvre établi par Hugo Weber, Bâle, Holbein Verlag, 1948, p. 88..

Relief rectangulaire, rectangles découpés, rectangles appliqués et cylindres surgissants (1936, Kunstmuseum, Bâle)


Postérité & reconnaissance

  • Reconnue par les pointures de son temps, mais peu connue du grand public
  • Occultée par le foisonement artistique de l'après-guerre (meure pendant la guerre à 54 ans)
  • Redécouverte par les recherche historiques sur les femmes artistes à partir des années 1980.
  • Centenaire de sa naissance en 1989
Trop souvent le grand public ne voit  en elle que l’épouse de Jean (Hans) Arp. C’est au centenaire de sa naissance, en 1989, qu’elle accède à une certaine reconnaissance, liée à la diversité de son œuvre et la radicalité novatrice de ses propositions plastiques. Depuis, ses travaux ne cessent de susciter des recherches et des expositions qui mettent en valeur le renouvellement artistique qu’elle a initié. L’histoire de l’art mesure désormais l’apport artistique de Sophie Taeuber-Arp à l’abstraction géométrique comme à l’art constructif et la considère par ailleurs comme la pionnière de l’art concret suisse.

Marcel Duchamp
Si l’une des caractéristiques de l’art moderne depuis Courbet est le culte de la main subconsciente, bon nombre d’artistes au cours des 30 dernières années ont abandonné ce culte et adopté une technique consciemment précise, qui ne laisse rien au hasard du pinceau. Sophie fut au nombre des premiers artistes qui pressentirent le danger qui pouvait résulter d’un abandon à la “peinture” automatique. Elle se donna pour tâche d’exécuter un dessin tel qu’il avait été “projeté” au préalable. Et, ce qui est plus important, elle réintroduisit l’arabesque géométrique comme concept artistique majeur. Assez singulièrement, tout “abstrait” qu’elle fût, elle aimait souvent utiliser un titre qui évoquait une analogie humaine dans le tableau : Six espaces aux teintes ensoleillées. En outre les titres, comme les tableaux eux-mêmes, étaient affectés d’un très net sens d’humour qui manque si souvent dans l’art abstrait. Sophie Taeuber-Arp par son attitude de détachement dans sa nature d’artiste, évoque l’artisan anonyme du Moyen Âge. 
Marcel Duchamp, notice du Catalogue de la collection de la Société anonyme, New Haven, Université de Yale, George Heard Hamilton, 1950, cité in Marcel Duchamp, Duchamp du signe (1976), Paris, Flammarion, 2008.



Source Canopé

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